« La piste de danse est couverte de gens, presque tous sont jeunes, presque tous s’ennuient, presque tous essaient de montrer qu’ils s’amusent. » Bret Easton Ellis – Moins que zéro
Avec son perfecto soigné et sa coiffure impeccable, Serge de York a toutes les apparences d’un nouveau dandy de la chanson française version 3.0. Mais derrière le masque, le cuir craquelle …
Fragile, cynique, hypersensible et terriblement universel, Serge est un oiseau de nuit tout droit sorti de la plume de Pacadis. Il règle ses comptes avec son histoire familiale, un père absent, la mélancolie de l’enfance. Une descente aux enfers racontée pied au plancher, de la façon la moins romancée possible. Mais sa musique et son écriture transpirent d’une pulsion de vie que seuls ceux qui ont touché le fond de la piscine sont en capacité d’avoir.
Assumant sa part d’ombre et de noirceur, Serge de York raconte l’injonction permanente de notre époque à l’avatarisation et au bonheur Instagram-able… et surtout le malaise qu’elle provoque chez
ceux que cette cosmétique de soi oppresse. Des titres cathartiques écrits pour sortir d’une dépression qui ne le quittait plus depuis le décès brutal de ses parents – synonyme d’un passage définitif à l’âge adulte.
« Je ne supportais plus les crises d’angoisse quotidiennes, qui me menaient doucement vers la tombe… Alors que la vie m’offrait tout, l’amour, une carrière professionnelle très gratifiante… J’avais un besoin vital de vider mon sac, de m’affranchir d’un passé toujours intériorisé, caché et masqué par des sourires de façade. »
Derrières les mots crus, le valium, le whisky, les antidépresseurs, il y a une fureur d’aimer et beaucoup de tendresse comme le suggère le titre « Embrasse-moi d’abord ». L’aspiration au bonheur derrière la provocation, c’est peut-être en ça que Serge de York se rapproche de l’homme à la tête de chou, auquel son nom d’artiste fait évidemment référence.
Déjà repéré, il y a une dizaine d’années au sein du groupe FLOU, Serge de York n’en est pas à son coup d’essai. Ce groupe, considéré comme un grand espoir de la scène régionale nordiste, avait
fini par splitter de façon fulgurante, après un premier maxi et une cinquantaine de concerts intenses et sulfureux au 4 coins de l’Europe.
Depuis, la mélancolie de Serge, « bien jolie, bien enfouie », a donné naissance à son premier album « Au Nord de nulle part ». Un clin d’œil au recueil de Bukowski « Au sud de nulle part » et sa
galerie de personnages inadaptés et sublimes. C’est ce même syndrome de l’imposture qui a nourri l’inspiration de Serge de York. Son écriture est à la fois furieusement et complètement intemporelle.
Ses morceaux forment un mélange de pop urbaine, d’indie Mancunienne et de chanson française.
Neuf titres épurés – élaborés en homestudio sur Ableton – presque rongés jusqu’à l’os et dont il ne reste que l’essentiel : des mélodies limpides, des rythmiques efficaces et des basses chaloupées
qui sonnent comme une évidence. En cela, Serge de York s’inscrit complètement dans cette scène française décomplexée qui manie les influences avec désinvolture empruntant autant aux aînés – Daniel Darc, Biolay ou Miossec – qu’au meilleur de la scène contemporaine – Terre Noire, Malik Djoudi, Orelsan…